Bénin : quand Patrice Talon tombe le masque, par Mamadou Thior

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Benin's President Patrice Talon attends a UEMOA (West African Economic and Monetary Union) meeting in Abidjan, Ivory Coast, April 10, 2017, REUTERS/Thierry Gouegnon - RC1D31A7F370

Spectr News ThemePour ceux qui en doutaient encore, le président béninois avait bien planifié son coup pour avoir une assemblée nationale aux ordres sans voix discordantes de l’opposition. Depuis le 1er Mai 2019, il y’a eu des morts dans son pays mais il a fait le mort pour laisser passer la tempête, bunkerisant le 16 mai la capitale politique Porto Novo, pour installer ses députés. Encore un recul démocratique venant d’un pays qui forçait pourtant le respect sur la scène africaine.

Patrice Talon ayant obtenu son graal, une assemblée qui ne pourra rien lui refuser, s’adresse à la nation le Vendredi 17 Mai, soit plus de deux semaines après les tragiques événements post élections législatives. Peu importe ce qu’il dira à ses compatriotes, les béninois ont fini de se faire une idée de qui il est réellement.

Talon n’a pas su décoder le message sorti des urnes avec un taux d’abstention de plus 77%. Donc un peu plus de 22% seulement des électeurs se sont déplacés. Pour qui sait lire, en réalité, c’est sa base affective de 2016 lors de son élection où au 1er tour, il avait récolté plus de 24% des voix, suivi de près par Sébastien Ajavon, son allié devenu son ennemi juré que Talon a fini d’exiler à Paris au terme d’un procès inique. Une façon de s’assurer un boulevard pour une réélection en 2021.

Tiens tiens ne dit-on que désormais en Afrique Francophone, les élections se gagnent en amont et plus en aval à travers des tours de passe passe. Pour les deux ans qui restent de sa présidence, il peut gouverner sans coup férir en organisant un nouveau scrutin inclusif, ce dont je doute. Je le vois faire le pari d’un jusqu’au boutisme qui va mener le Bénin vers l’abyme.

Il méconnaît cependant ses compatriotes s’il pense gouverner tranquillement quitte à militariser son pays comme il le fait depuis le début de la crise actuelle. Le Bénin a des ressorts encore solides pour refuser une mise au pas dans le seul but de taire toute voix discordante.

Il est temps que nous nous penchions sur le cas de tous ces opposants qui à la recherche du pouvoir, défendent les principes directeurs de la démocratie mais une fois élus, s’assoient là-dessus. La constance n’est pas une vertu chez tous ces Chefs d’Etat qui font dans la ruse au point de remettre en cause, les acquis démocratiques de leurs pays.

Qui aurait pu imaginer un seul instant qu’Alpha Condé au vu de son parcours et de son combat jusqu’à la prison sous Lassana Conté avec son âge avancé, en serait à forcer un troisième mandat contre vents et marées ? Que dire d’Alassane Dramane Ouattara animé par le même désir dans un pays où les démons de la division n’ont pas dit leur dernier mot ? Tous les deux font peser sur la Guinée et la Côte d’Ivoire, une année 2020 pleine d’incertitudes.

L’Afrique francophone a beaucoup à apprendre de celle anglophone et même lusophone. La preuve par le Prix Mo Ibrahim qui récompense les démocraties réussies sur le continent, qui attend toujours preneur en Afrique Francophone.

Outre l’ex-présidente libérienne Ellen Johnson Sirleaf en 2017, seulement quatre anciens présidents africains ont été récompensés depuis 2007, quand le prix a été accordé pour la première fois : le Mozambicain Joaquim Chissano (2007), le Botswanais Festus Gontebanye Mogae (2008), le Cap-Verdien Pedro De Verona Rodrigues Pires (2011) et le Namibien Hifikepunye Pohamba (2014).

A ce jour, trois anglophones et deux lusophones, naturellement donc aucun francophone. Depuis 2007, à sept reprises, le Prix Mo Ibrahim n’avait pas été décerné faute de candidat réunissant les qualités requises alors que bien des Chefs d’Etat auraient pu l’emporter en Afrique francophone. Seulement les présidents en fin de mandat, faisaient tout pour garder le pouvoir.

Les lauréats du prix Mo Ibrahim reçoivent 5 millions de dollars soit 3 milliards de FCFA, versés sur 10 ans, puis une allocation à vie annuelle de 200.000 dollars soit 120 millions de FCFA. Peut-on trouver assez persuasif pour amener nos “Hommes forts” à quitter le pouvoir ?

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